Stagiaires et civilistes : encadrés ou exploités ?
14ème Café des bonnes pratiques des organisations de l'ESS,3 novembre 2009
Introduction
La majorité des organisations de l'économie sociale et solidaire accueille des stagiaires ou des civilistes pour des durées déterminées. Pour les stagiaires en particulier, le stage a en général des objectifs identifiés conjointement et devrait apporter un certain nombre de bénéfices aux deux parties. Dans la réalité, il n'est pas toujours facile de conjuguer encadrement de qualité, transmission de savoirs et de compétences avec le stress au quotidien, la surcharge de travail et les autres impondérables.
Quelles solutions ont été retenues par les membres d'APRÈS-GE ? Qu'ont-ils mis en place pour assurer un encadrement de qualité et l'atteinte des objectifs des stages ? Quels sont les limites et les obstacles rencontrés ? Quelles sont les obligations légales ? Voici quelques-unes des questions qui ont servi de fil conducteur aux échanges de bonnes pratiques.
Nous avons demandé aux participants d’apporter leurs expériences et réflexions, en se posant notamment les questions suivantes :
- Quelles différentes catégories de personnel temporaire non salarié avons-nous dans notre organisation ?
- Combien de personnes cela représente-t-il ?
- Quelles sont nos lignes directrices et nos pratiques ?
- Quels problèmes rencontrons-nous ? Et quelles solutions avons-nous identifiées ?
État des lieux
Il y a eu neuf participants de huit organisations membres et quatre collaborateurs d'APRÈS-GE autour de la table. La majorité des organisations de l'économie sociale et solidaire accueille des stagiaires (emploi à durée déterminée, rémunéré ou pas, dont l’objectif peut être très différent : stage d’observation, de formation, de réinsertion à l’emploi, de requalification professionnelle) ou des civilistes (personne ayant refusé d’accomplir le service militaire et effectuant à la place un stage dans une entreprise de la société civile) pour des durées déterminées. Pour les stagiaires en particulier, le stage a en général des objectifs déterminés conjointement avec l’employeur et devrait apporter un certain nombre de bénéfices aux deux parties. Dans la réalité, il n'est pas toujours facile de conjuguer encadrement de qualité, transmission de savoirs et de compétences avec le stress au quotidien, la surcharge de travail et des moyens financiers limités.
Bonnes pratiques
Encadrement du stage
L'encadrement d'un stage dans l'organisation accueillante dépend beaucoup de l'organisation elle-même. On trouve des organisations n'accordant pratiquement aucun encadrement. Par contre, les stages obligatoires des HES sont encadrés par des objectifs clairs et précis et le soutien du stagiaire est organisé. Le programme PPE+ lancé par APRES-GE comme MMT (Mesures du marché du travail financées par le SECO) prévoit l'encadrement des stagiaires: il est demandé dans les standards d'encadrement, acceptés par les organisations d'accueil, qu'un réfèrent, employé à 50% minimum, consacre une demie-heure par semaine pour discuter avec le stagiaire des objectifs du stage, des compétences qu'il aimerait acquérir ou approfondir et de ses recherches d'emploi. Une convention tripartite (le participant PPE+, la structure d'accueil et la chargée d'insertion PPE+ chez APRÈS-GE) rappelle également les droits et les devoirs des structures comme des participants.
La forme que prendra l’encadrement variera fortement selon le type de stage, la personnalité et les capacités du stagiaire, la taille de l’entreprise. Par exemple, si le stagiaire se trouve placé dans une petite équipe, son intégration, le suivi de son stage et de l’acquisition des connaissances se fera presque naturellement, au jour le jour, au fil des réunions normales de l’équipe. Il n’en ira pas de même dans une plus grande entreprise où il sera nécessaire de formaliser les procédures de suivi et d’encadrement, sinon le stagiaire risque de se trouver oublié et perdu.
L’encadrement accordé au stagiaire offre un bon point de repère pour s’assurer que celui-ci n’est pas indûment exploité. Ce point répond à la critique fréquemment adressée aux organismes employant des stagiaires, et notamment aux entreprises de l’ESS, de « profiter » d’eux et de pratiquer un dumping salarial.
Par ailleurs, l’encadrement du stagiaire devrait être taillé à la mesure de son profil, afin qu’un maximum de liberté d’initiative et de responsabilité puisse graduellement lui être confié. Il faut éviter l’encadrement de type militaire qui fasse du stagiaire un éternel subalterne passif, ce qui le défavoriserait fortement dans sa recherche ultérieure d’emploi.
Le stagiaire, une charge "calculée" par l’entreprise
Il faut toujours rappeler que la relation stagiaire-entreprise est à double sens, le stagiaire aide l’entreprise à fonctionner et l’entreprise aide le stagiaire à acquérir une qualification qui lui fait défaut. Les deux parties doivent pouvoir en retirer bénéfices. L’entreprise qui souhaite accueillir un stagiaire doit toujours calculer à l’avance la charge que cela représentera pour elle, en ressources humaines et en temps.
Durée du stage
La durée du stage dépend de trois facteurs: du type de stage, du type d'entreprise accueillante et des compétences de la personne. Elle peut varier d’une semaine à un an, la seule règle à observer (si possible !) étant qu’elle corresponde aux souhaits et aux besoins des deux parties. L’important, c’est que la durée soit fixée avant le début du stage. Il peut être profitable pour tous les participants d'inclure une troisième partie (l’organisme qui envoie le stagiaire) qui serve d' intermédiaire entre la strcuture d'accueil et le stagiaire et qui défende les intérêts des deux parties.
Salaire du stagiaire
Les salaires des stagiaires varient de 0 francs à quelques milliers de francs par mois selon l’entreprise et le secteur. La seule règle que l’on puisse donner consiste à vérifier que le stagiaire dispose de moyens d’existence décents.
Certification
La certification du stage est importante pour la suite de la vie professionnelle du stagiaire. Dans cette perspective, les termes « stage » ou « stagiaire » ne sont pas très porteurs pour convaincre un futur employeur. Un certificat utile s’appellera plutôt "certificat de travail" ou "de mandat temporaire" et décrira de façon détaillée les tâches accomplies, les compétences du chargé de mission ou de projet, ainsi que ses qualités personnelles. Le programme PPE+fournit pour sa part des lignes directrices pour la rédaction de ce certificat.
Annexe
Convention de mission PPE
Auto-critique et évaluation du Café
Certains participants ont jugé ce Café enrichissant et repartent avec plein d’idées à concrétiser. D’autres ont trouvé que la discussion n’avait que survolé le thème sans creuser suffisamment les questions délicates, et repartent frustrés. Il faut noter que cette dernière appréciation est récurrente et revient à l’issue de presque chaque Café.
Comment améliorer les choses ? Les solutions sont connues (meilleure préparation des séances, étude de la littérature, consultation de spécialistes du sujet traité), mais se heurtent à des obstacles difficiles à franchir : les collaborateurs d’APRES-GE n’ont pas le temps disponible pour mieux préparer les Cafés, les organisations membres n’en ont pas davantage !
Une première mesure, peu coûteuse en temps, serait que les membres qui ont eu à affronter le sujet traité dans le Café à venir transmettent à APRES-GE les références bibliographiques qu’ils connaissent. Une deuxième mesure serait que les sujets abordés soient choisis par les membres eux-mêmes, ce qui permettrait d’être plus concret et d’aller plus en profondeur. Nous partons du principe que les Cafés offrent une occasion unique aux membres de se rencontrer et d’échanger. Alors, pour en améliorer le contenu et l’attractivité, nous aimerions beaucoup recevoir vos avis, suggestions et propositions.
Référence:
Rambach, Marie et Anne (2001). Les intellos précaires. Paris, Éd. Fayard.