Redonnons du sens à l’économie

"Il faut mettre en place un nouveau paradigme, où l’homme serait explicitement à la première place."

Par Vincent Desobry

Une question fondamentale refait surface partout aujourd’hui dans le monde :

L’entreprise est-elle au service du bien public, des personnes qui y travaillent et qu’elle sert ou est-ce l’homme qui est au service de l’entreprise, vision caricaturale exprimée dans le film « Matrix », énergie à la disposition (libre) de l’entreprise, au service de la machine et du système ?

D’un côté extrême du monde, l’ultra libéralisme voudrait en quelque sorte assujettir l’être humain dans un premier temps à la machine, en définitive à d’autres êtres humains, une élite, ceux qui « possèdent » les richesses de la terre.

De l’autre côté, un système où l’entreprise serait totalement au service de l’homme, le communisme par exemple, a par trop montré ses limites.

Cette voie-là a mené aux mêmes conclusions : seuls quelques hommes, ceux-là même qui tirent les ficelles de l’idéologie, bénéficient et en font bénéficier quelques autres du système - classe particulière et surtout despotique. L’intégrisme religieux et terroriste d’aujourd’hui rejoint cette dernière catégorie.

Le système communiste a totalement oublié oblitéré la dignité humaine, son équivalent opposé l’ultra libéralisme aussi, dont le crédo ne semble concerner que ceux qui appartiennent au système ou qui n’en sont pas encore exclus ou tombés. D’où ce réel problème, aujourd’hui : les exclus, les chômeurs, les marginaux sont devenus tout au plus des survivants et ils sont de plus en plus nombreux. Les statistiques restant au service .... du système, ne comptent pas ceux qui ont renoncé à demander ou pire encore à recevoir. Il reste donc à mettre en place un nouveau paradigme, où l’homme serait explicitement à la première place. Et regardons le monde aujourd’hui. Le jour se lève sur une autre dimension dans l’économie humaine. Une petite lueur, certes, bien réelle.

Qualifiée d’utopique par beaucoup au départ, elle devient de plus en plus réaliste et concrète. Il s’agit de l’économie solidaire et sociale. Les moyens financiers et politiques dont elle dispose étant limités, ce qui est remarquable, ce sont les valeurs qu’elle sous-tend : solidarité, dignité, dynamisme, dépassement, ouverture, efficacité, éthique, détermination, écologie. Au delà encore, une créativité de tous les instants qui fait des mêmes limitations budgétaires ou matérielles une source de solutions, d’avancement permanent.

Au delà encore, ce qui séduit, qui surprend même l’homme, le scientifique que je fus, issu de l’industrie, qui a bourlingué dans des milieux où ce sentiment n’existait pas, c’est la présence du sens. Sens de ce qu’on fait, de la raison pour laquelle on le fait, sens des résultats obtenus en termes de vie, de joie et non plus seulement de survie ou de victoire acquise au détriment de la concurrence, par exemple. Ici, il s’agit plus de se dépasser que de dépasser l’autre, d’avancer ensemble plutôt que de finir premier, de témoigner et d’avancer dans la dignité que de paraître. L’entreprise est un outil de passage dans l’adulte, de la liberté « pure » à son équilibre avec la responsabilité. Viktor Frankl en évoquant les USA disait qu’il trouvait merveilleuse l’existence d’une statue de la liberté de New York et qu’il serait encore plus heureux quand, pour l’équilibre une statue de la responsabilité se dresserait à San Francisco. I

* Spécialiste en relations humaines, fondateur du cabinet VMD Formation et Conseil - IDCoach, Marly.

 

A propos

Date de parution:
mer, 19.11.2008 - 06:00
Thématiques: 
ESS

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