Salariés et bénévoles, une cohabitation délicate

La professionnalisation du secteur est de plus en plus grande. Les responsables associatifs s’organisent en conséquence pour trouver un rôle à chacun, salariés comme bénévoles.

Salariés et bénévoles, une cohabitation délicate

La professionnalisation du secteur est de plus en plus grande. Les responsables associatifs s’organisent en conséquence pour trouver un rôle à chacun, salariés comme bénévoles.

Embaucher des salariés, avec le professionnalisme qui les caractérise, ou continuer de recruter des bénévoles, toujours souples et disponibles ? Tel est l’un des dilemmes actuels des associations. Si les responsables associatifs accueillent tous favorablement l’engagement des bénévoles à leurs côtés, certains d’entre eux souhaitent désormais confier à des professionnels les principales missions de leur structure.

La complexité croissante de la législation, l’obligation de transparence vis-à-vis des donateurs, l’impératif d’optimisation des fonds collectés, le perfectionnement des modes de communication, tout incite à l’embauche de salariés dans le secteur associatif. Leur nombre ne cesse d’ailleurs d’augmenter : ils sont au nombre de deux millions au sein du tiers secteur, pour plus de 14 millions de bénévoles.

Complexité juridique croissante

«Certaines organisations continuent de vouloir garder un lien direct avec le public via leur réseau bénévole quand d’autres, devenues prestataires de services, emploient davantage de salariés afin de répondre à la très grande technicité des actions qui leur sont confiées», explique Roger Sue, sociologue à l’université Paris-Descartes et spécialiste du monde associatif.

À France Terre d’asile, organisation ayant notamment pour vocation d’assister juridiquement les immigrants, le choix de la professionnalisation s’est récemment imposé. Pierre Henri, son directeur général, justifie cette orientation par la complexité juridique croissante des situations à gérer.

«En l’an 2000, nous avons fait le choix de devenir une organisation de salariés en raison des missions très sensibles qui nous sont confiées : qu’il s’agisse de la protection des mineurs ou de la gestion de dossiers de réfugiés, nos membres doivent être très compétents sur le plan du droit.»

Autre structure, autre discours

Résultat : l’association compte aujourd’hui 500 salariés pour une centaine de bénévoles. «Nous orientons ces derniers vers des actions n’engageant pas directement la responsabilité pénale ou civile de l’association, précise-t-il. Comme les cours d’alphabétisation par exemple.»

Autre structure, autre discours. Au Secours catholique, la stratégie inverse a été retenue. Comme par le passé, les bénévoles constituent l’immense majorité des acteurs de l’association. On en compte 65 000 pour 960 salariés. Un choix justifié par l’impératif de proximité avec les publics les plus démunis.

«Notre réseau de bénévoles irrigue la totalité de la société et nous permet d’être toujours très réactifs à ce qui se passe sur le terrain», explique Stéphane Dura, responsable du recrutement et de la mobilisation au Secours catholique.

Leur présence sur l’ensemble du territoire et leur très grande disponibilité constituerait un atout irremplaçable, aux dires du responsable. « Il n’y a qu’un bénévole pour passer toute une journée à aider une famille en grande précarité à emménager dans un nouveau logement. Aucun travailleur social ne peut, dans ses contraintes horaires, lui consacrer autant de temps. Or ce type d’entraide nous semble décisif. »

Eviter compétitions, récriminations et polémiques

Malgré des divergences notables en matière de recrutement, nombre d’associations font travailler ensemble salariés et bénévoles. À charge pour les responsables de gérer des équipes souvent très hétérogènes. Une gageure parfois.

«Il est très difficile de manager simultanément employés et volontaires, assure une responsable associative basée à Paris. Le salarié a un contrat de travail impliquant un certain nombre de règles à respecter en termes de cadence, d’objectifs, de résultats chiffrés. Alors que le bénévole, lui, ne nous doit rien. Il faut même parfois veiller à lui donner envie de rester et de continuer à s’impliquer à nos côtés !»

Aux responsables associatifs donc d’organiser de manière stricte les actions relevant des uns et des autres. Et ce, afin d’éviter compétitions, récriminations et polémiques. Il arrive parfois en effet que certains employés se plaignent de voir les bénévoles occuper des fonctions salariées. «Ce débat n’a pas lieu d’être, estime Jacques Henrard, président de la Conférence permanente des coordinations associatives. Les bénévoles sont des facilitateurs d’action. Ils constituent un lien irremplaçable avec le public.»

Marie BOËTON

A propos

Date de parution:
mar, 09.09.2008 - 06:00
Source: 
Marie Boëton
Thématiques: 
Bénévolat
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