CALIM: de la monnaie Léman au Radis

À Genève comme ailleurs en Europe, les monnaies complémentaires suscitent un regain d’intérêt. La mise en œuvre du droit à l’alimentation remet au goût du jour des outils numériques développés depuis une dizaine d’années.

Du Léman au Radis, une histoire d’innovation ouverte comme l'économie sociale et solidaire en a le secret !

En 2015, dans le réseau de l'économie sociale et solidaire genevois, a été créée la Monnaie Léman : locale, démocratique, éthique (les valeurs de l'ESS) et transfrontalière. D'abord sous forme de billets de lémans sécurisés, puis dès 2017 a été créée une monnaie numérique aux côtés de la monnaie papier. Avec l'objectif de combiner une monnaie convertie et garantie (car adossée à une devise, CHF & Euros), et une monnaie mutuelle (un système multilatéral d’échange local) qui encourage la consommation locale (C2B), mais également des transactions entre entreprises (B2B), entre individus (C2C), et surtout peut-être entre une entreprise et un particulier (B2C), sous la forme d’une partie du salaire par exemple.

Il s'agit lors de son lancement en 2017 de la première "crypto-monnaie locale" au monde, reposant sur la Com’Chain, conçue depuis Genève pour être la "blockchain des communs". L'utilisation de la blockchain permet d'assurer une haute sécurisation des paiements, ainsi qu'une gouvernance décentralisée. Et tout l'intérêt de l'outil Com'Chain est d'avoir modifié les règes du jeu de la blockchain (grâce à une équipe d'experts IT) pour assurer un système peu gourmand en énergie et non-spéculatif.

Si le Léman a été la première monnaie à être sécurisée sur Com’Chain, c'est aujourd’hui une douzaine de projets qui utilisent cet outil de paiement, principalement des monnaies locales et des collectifs de sécurité sociale de l’alimentation (SSA), comme la CALIM. Le déploiement de ces outils de paiement libres et opensource est assuré par l'association européenne Lokavaluto, co-créée en 2019 par Monnaie Léman avec d'autres monnaies locales.

> Pour aller plus loin, lire cet article de Moneta sur la monnaie Léman.

Cet automne a été lancée la CALIM, la Caisse genevoise de l'alimentation. Cette initiative a pour objectif d'expérimenter un mécanisme démocratique de redistribution permettant de rendre accessible une alimentation "adéquate" aux genevois·es, conformément au Droit à l'alimentation inscrit dans la Constitution en juin 2023. Il s'agit d'un dispositif très complémentaire au projet Locali porté par APRÈS-Ge et ses membres:

  • Locali structure les filières économiques de la transition et apporte les biens/services (bibliothèques d'objets, paniers, épiceries, réparations, vêtements de seconde main, mobilité partagée) dans les quartiers au pied des immeubles,
  • et CALIM permet de rendre accessibles les produits alimentaires qui sont parfois plus chers en étant issus de l'agriculture biologique et locale en comparaison aux chaînes de production globalisées.

Ses membres cotisent en francs suisses en fonction de leur niveau de revenus, et tou·tes reçoivent chaque mois le même montant (150.-) en "radis" (1 radis = 1 CHF, comme le Léman), une monnaie thématique qui ne peut être dépensée que dans les lieux de distribution alimentaire conventionnés. Le choix de ces lieux étant réalisé selon des critères décidés par des comités citoyens, assurant la dimension démocratique de la Caisse. La différence entre le montant des cotisations des membres et les radis versés chaque mois est assurée par des fondations et des communes partenaires. Au terme de cette période pilote, l'objectif est que l'Etat puisse prendre le relais du financement de cette caisse, dans le cadre de l'application du Droit à l'alimentation (l'avant projet de la loi d'application est justement en cours de consultation publique).

> Pour aller plus loin, lire la revue de presse de CALIM.

Il est motivant de noter qu'un outil de paiement (Com'Chain), initié il y a près de 10 ans par la monnaie Léman, puis déployé à l'échelle européenne au travers de Lokavaluto, permette aujourd'hui aux "radis" de circuler dans le cadre du pilote de la CALIM !

Les outils monétaires compémentaires sont de puissants leviers de financement et de développement de la transition écologique et sociale, et nous ne sommes qu'au début de ces expérimentations. Souhaitons maintenant qu'elles soient rendues mainstream par des politiques publiques ambitieuses en la matière.

> REJOINDRE LA CALIM <

C'est cette vision qui a notamment été portée par notre Délégué à l'international dans le cadre du Forum mondial de l'ESS (GSEF) à Bordeaux et les Rencontres européennes des Monnaies locales, qui ont eu lieu au mois d'octobre.

> Lire le résumé de ces forums fait par notre cousine APRÈS-Vd.

Partager